maladresses à éviter

niveau 2

Il est difficile d'être exhaustif sur la question des erreurs d'harmonie. Le goût prend une grande part dans certaines appréciations, mais il est néanmoins évident que les lourdeurs, les platitudes, les duretés ou les confusions doivent être éliminées autant que possible.

Voici quelques points pour échapper aux travers du novice :

Il n'y a pas besoin de beaucoup d'accords différents. 
Chaque mélodie à son tempo et son rythme, l'harmonisation doit en respecter le caractère. En considérant le tempo et la mesure, nous avons des indices pour savoir quand changer d'accord.
Le rythme harmonique est généralement lié à la pulsation : avec un tempo modéré, on change d'accord selon la noire ou la blanche dans la mesure 4 / 4. Certains cas, avec tempo vif, s'accommodent d'un seul accord par mesure. Certains styles utilisent habituellement ce procédé. Mais en faire un système trop régulier affaiblit l'intérêt musical, et il est bon que des variantes de durée aient lieu : deux accords en une mesure, ici ou là.
Avec la mesure 2 / 2, le changement se fait selon la blanche, et on peut avoir des mesures avec un seul accord.
Avec la mesure 3 / 4, il y a deux cas : le tempo vif demande un accord par mesure (la valse) ; un tempo plus lent autorise de changer d'accord avec les noires (le menuet).
 La mesure 6 / 8 comporte deux temps, donc deux accords. Mais un tempo lent permet très bien une plus grande flexibilité, et en particulier de changer d'accord selon la croche (on a alors 3 accords dans un temps), puis de varier la durée des accords (une noire et une croche) ...
On aura d'ailleurs fréquemment ce genre d'inégalité du rythme harmonique dans le style romantique, où un même accord peut rester deux mesures puis évoluer très rapidement en une succession d'accords variés selon un rythme de valeurs courtes. 

Il est toujours possible de rester plus longtemps sur les degrés principaux, après une cadence par exemple.

Trop d'accords différents enchainés trop rapidement conduisent à une confusion auditive, on ne perçoit pas de progression mais une agitation lourde et désagréable.

Penser l'harmonie à partir de la basse.
Pour beaucoup de néophytes, seul importe le choix d'un accord (d'un degré) pris comme une entité globale, sans se préoccuper de la note de basse. Cela conduit à des harmonisations approximatives, avec une basse hasardeuse et sans fonction. Ces fausses basses déstabilisent l'harmonie.
Quoique les degrés aient été bien choisis, si la note de basse n'est pas adéquate (ce qu'on appellera une fausse basse) le résultat sera décevant et la progression semblera instable et inaboutie. Il faut donc veiller en priorité à la fermeté de la basse, sous l'angle de sa cohésion mélodique et sous l'angle de sa cohérence pour soutenir la progression harmonique. L'usage négligent et réitéré d'accords en second renversement est une marque infaillible du débutant.

Les anacrouses ne s'harmonisent pas. 
C'est le cas général : l'effet est plus léger ainsi. Cependant, on peut avoir besoin, dans certains cas, d'harmoniser une anacrouse : ce sera généralement avec un Ve degré. Seule l'harmonisation du Choral à quatre voix comporte traditionnellement un temps en anacrouse toujours harmonisé, avec un Ier degré.

Ne pas répéter la même note de basse sur un temps faible puis un temps fort.
Sauf cas rare, où cette répétition est thématique, l'effet d'une telle répétition est très maladroit, même avec changement de degré.
De même, la répétition d'un même degré sur un temps faible puis un temps fort (en particulier le 4e temps puis le 1er temps d'une mesure 4 / 4) donnera un mauvais effet : la faiblesse vient que le temps fort s'affirme mieux avec un nouvel accord.
Seul cas : le Ier degré, si le temps fort porte un 2nd renversement (après un état fondamental, sur le temps faible).
Après une césure marquée par une cadence (I ou V), on peut repartir avec le même degré.
Répéter le même accord temps fort puis temps faible n'a, par contre, aucun inconvénient.

Éviter la succession V - IV, avec les deux accords à l'état fondamental.
Surtout si la note sensible est placée au soprano dans le Ve degré !...
Avec un renversement, cet enchainement sonnera moins dur.

Ne pas employer d'accord en second renversement si ce n'est pas nécessaire.
Comme expliqué plus haut, il y a seulement trois cas où l'accord de quarte et sixte est attendu. En dehors d'eux, son emploi est généralement erroné.

Ne pas ignorer les cadences.
La phrase musicale suit un parcours qui comporte des respirations, des arrèts plus ou moins marqués. Ne pas en tenir compte risque d'aboutir à une harmonisation incohérente, avec des formules harmoniques qui seront jugées bizarres : les cadences sont des jalons attendus par l'auditeur. Les escamoter par négligence déséquilibre la succession harmonique, le remplacement des degrés forts par des degrés fatalement plus faibles sera rarement un signe d'originalité heureuse.

 

Exercice B 5

Harmonisez à quatre voix 

Corrigé de l'exercice B 5

Comme déjà indiqué, vos travaux (même satisfaisants, en apparence) peuvent parfois contenir des méprises ou maladresses qui vous restent totalement invisibles !  
C'est pourquoi l'examen par un professeur d'harmonie reste la seule façon de garantir la qualité de votre progression.
 

Ajoutons maintenant l'usage de quelques notes étrangères, commençons par la broderie


 

Date de dernière mise à jour : dimanche, 30 octobre 2022

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Commentaires

  • Flux_Sonore
    • 1. Flux_Sonore Le mercredi, 04 septembre 2024
    Bonjour,

    Merci pour ce site extrêmement fourni et bien construit, qui m'aide à revenir sur quelques points que j'ai un peu trop vite passés dans mes classes d'harmonie.

    Je me permets de réagir aux deux commentaires portant sur la correction des maladresses par l'IA. Il semble que l'IA ne soit pas encore entrainée à déchiffrer des partitions et encore moins à identifier les maladresses qu'elle recèle relativement aux objectifs poursuivis par le compositeur.

    En revanche, après avoir un peu "joué" avec Suno.AI, qui permet la génération de signal sonore sur consigne écrite de l'utilisateur (en général par mots-clefs), je me demande s'il ne serait pas intéressant de se faire, soi-même, correcteur de l'IA et s'il n'y aurait pas là un intérêt pédagogique. En effet, l'IA aujourd'hui fait des erreurs, commet des maladresses, en particulier en matière de musique classique savante (car Suno.AI a été d'abord entraînée sur les musiques actuelles amplifiées) et il est donc très intéressant de s'essayer à lui faire générer quelques propositions selon des mots clefs bien précis, pour ensuite repasser derrière en relevant l'harmonie, et en analyser les défauts et les qualités. Faire ce travail avec en vis-à-vis un même travail sur des compositions d'êtres humains dans le même style pourrait être un bon moyen de travailler l'écoute active et la sensibilisation à l'harmonie et à la forme. Si ça intéresse certains, je laisse un lien redirigeant vers une étrange proposition que j'ai faite générer par Suno avec les mots clefs "faux-bourdon, classical guitar, andante, minor" (tous les mots clefs n'ont pas été vraiment compris ahah)

    Difficile de savoir quoi en penser, mais je me dis que le travail de comparaison entre l'IA essayant d'imiter Bach par exemple et Bach lui-même pourrait être très instructif sur le plan harmonique, stylistique et compositionnel.

    Bref, l'enjeu est aussi d'inventer des nouveaux usages de l'IA et de ses capacités pour voir ce qu'elle peut nous apporter ! (mis à part le fait toutefois significatif qu'il s'agisse d'un désastre écologique)

    FS
    • Olivier MIQUEL
      • Olivier MIQUELLe samedi, 02 novembre 2024
      le terme "désastre écologique" pour l' I A est à souligner. Chacun s'émerveille de cette avancée technologique sans voir que le consommation électrique qu'elle induit est colossale. Les GAFAM investissent massivement dans la recherche sur les mini centrales nucléaires privées parce qu'elles voient bien que la consommation électrique va devenir un vrai problème. Pour le reste, en ce qui concerne l'amusement qui consiste à faire imiter "du Bach" par une machine, où est l'intérêt ? Je réitère le terme du commentaire ci-dessous : pour un musicien c'est une prothèse mentale (dont il ne devrait pas avoir besoin).
  • M.B
    • 2. M.B Le jeudi, 23 mars 2023
    Bonjour Monsieur,
    j'aimerais savoir, au sujet des maladresses, si l' I.A pourrait justement corriger des exercices, et si oui, est ce qu'il existe des sites internet consacrés à cela?
    B.M
    • Olivier MIQUEL
      • Olivier MIQUELLe jeudi, 23 mars 2023
      Bonjour ! Cette question pourrait être jugée "naïve", mais elle recèle un point qui mérite d'être étudié. Cela se rapporte à la vision admirative que l'on porte encore aujourd'hui à "l'intelligence artificielle". Peu semblent avoit décelé quel véritable fléau se cache derrière, et quel est son potentiel destructeur sur l'être humain lui-même. Pour rester dans le cadre de l'exercice de la musique, et particulièrement celui de la création musicale, déléguer à un algorithme le soin de décider ce qui, spécifiquement, dépend de la créativité personnelle, de l'expression "de l'âme" pour employer des grands mots; cela revient à abdiquer toute volonté d'ordre spirituel. Même si, en apparence, cela se passe à la marge, et n'est vu que comme une aide, un soutien sur le plan formel. De mon point de vue, associer l'I.A. à une démarche d'expression personnelle, c'est renoncer à ce qui, précisément, en fait une obligation d'effort à multiples niveaux (audition, finesse de perception, goût, connaissances), qui seul peut s'avérer positif pour l'évolution individuelle. Mieux vaut la maladresse (qui, avec du travail et un apprentissage soutenu, pourra être corrigée) que le lissage artificiel fourni par ce qui ne serait qu'une prothèse mentale. Bon travail !
  • Vincent
    • 3. Vincent Le lundi, 04 mars 2019
    @Arnaud
    Les octaves consécutives sont acceptées justement si elles constituent une cadence parfaite. Voir par exemple le final de la Polonaise n°6 de Chopin.
  • Arnaud
    • 4. Arnaud Le jeudi, 11 janvier 2018
    Bonjour,

    Dans l'exercice C de B_5, la soprane finit par Sol-Do, ce qui interdit à la basse de faire de même sous peine d'octaves consécutives. Mais alors, comment faire une cadence parfaite ? Je me doute bien qu'ici, une exception rentre en jeu mais je n'arrive pas bien à en cerner les règles et la logique. Vous est-il possible de m'éclairer ?
    Une autre question : peut-on finir sur une octave entre deux voix par mouvement direct ? (C'est toujours ce problème de la cadence parfaite qui oblige la basse au V-I)

    Merci,
    Arnaud
    • Olivier MIQUEL
      • Olivier MIQUELLe lundi, 25 juin 2018
      Justement, voici le seul cas où aucune autre bonne solution n'existe que... les octaves consécutives. On admet qu'une cadence parfaite terminant une section présente ces octaves, car elles sont hautement conclusives. La basse ne peut être modifiée, tout renversement atténuerait l'effet de cadence parfaite ; il ne reste que les octaves consécutives, moindre mal. Ici elle prennent un tout autre sens que deux notes en cours de phrase qui se trouveraient renforcées inopinément par ce redoublement...

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